mardi 7 janvier 2014

Qui a peur de Jean Tirilly?.

Certes,le peintre breton Jean Tirilly(1946-2009), natif de Léchiagat petit port breton de l'extrême pointe du Finistère n'a nul besoin d'une publicité supplémentaire pour une célébrité posthume.Célèbre et célébré il l'est depuis longtemps et sa gloire irait plutôt croissant.Qui veut découvrir ce peintre et artiste étonnant n'a que l'embarras du choix:Exposition permanente au musée spontané de Bruxelles,mais aussi le musée de Lausanne ou Pont Aven.Un livre intitulé"Jean Tirilly poète des couleurs",sous la signature de Maryvonne Gognalons Nicolet lui est également consacré.De nombreuses expositions lui ont permis de se faire connaître et de s'exprimer sur son art,car nous dit-on,ce grand timide savait se montrer bavard,à l'occasion.


(Un clic sur les photos pour agrandir).

Taleouennou(crânes).









                Quelques toiles pour se familiariser avec l'art très spécial de Jean Tirilly.Il expliquait dans une interwiew:"En cinq minutes,le fond est fait.Quand je trouve ma couleur de fond,je sculpte,mais les personnages viennent comme cela...Tout ça c'est une transe.On n'est pas en train de réflléchir.C'est les yeux grands ouverts que je me dis:tiens si je mettais ça...Il y a le recul,toujours en marmonnant.Et la construction arrive.Les toiles  s'enchaînent les unes après les autres."
Ses propos sont évidemment les plus importants de tous ceux qui gravitent autour de son oeuvre,souvent plus dithyrambiques que nécessairement pertinents."Comme les gosses un peu fous,mes tableaux me dépassent,explique-t-il.C'est un film en cours de montage,je m'arrête sur un plan séquence.Un plan à travailler d'urgence,sinon l'inspiration disparaît.On n'est pas dans le normal mais dans l'acte de peindre".Et de codex en codex un monde se révèle qui bouleverse ,irrite,séduit ou révulse,mais en tous cas ne laisse jamais indifférent.Car ici chacun comprend que par-delà l'étrangeté,la monstruosité,au-delà du premier impact il est question d'âme et d'amour,cet art étonnant nous oblige et nous conduit à nous-mêmes.            







Quelques propos sur Jean Tirilly.
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"Comment décrire ces mêlées humaines,ce grouillement de vie,ce match frénétique et bariolé...Avec ces visages,masques aux orbites creuses,la bouche toujours ouverte comme citrouilles crevées,ces vieilles serrures détraquées,le jeu savant des entrelacs colorés,stylisations de bras et de jambes sans corps et les échappées vers le ciel ou la mer ou des morceaux de décors champêtres,bouts de paysages,villages traités au minimum,comme dans les fonds des primitifs Italiens.Un monde d'agonisants joyeux,de morts-vivants en effervescence de zombies en goguette plus proche de la « ballade des pendus » ou d'une vision festive du Jugement dernier que de la frivolité profane de la « comédia  del arte »..La couleur,très savamment maîtrisée est trompeuse dans l'univers de Tirilly,où rôde la faucheuse,l'Ankou des enclos paroissiaux,avec un coloriage de bande dessinée...Théâtre de pantins où se joue la vie et la mort dans un stade en furie...
Un art très mental,condensé de vie,où dans une écriture symbolique d'une grande cohérence,ce Villon de la peinture,grand poète d'une époque de mutation nous offre avec un minimum d'accessoires de belles fables non-verbales sur les pérépéties actuelles de la condition humaine"...

Laurent Danchin.









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                Visiter une exposition de Jean Tirilly ou simplement faire connaissance avec quelques unes de ses productions n'est jamais un acte anodin.L'artiste à la façon de l'araignée vous attire dans sa toile et ne vous lâche plus.On n'en sort pas indemne.Ce signe à lui seul prouve l'authenticité et l'importance de sa création et de son engagement d'homme dans l'art qu'il s'est choisi à moins que ce ne soit l'inverse.







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Grand,Jean Tirilly l'est quand,mû par la nécessité intérieure,il fait ressurgir des limbes l'âme et l'esprit d'un peuple,le sien, le mien,le peuple breton par le truchement de quelques détails symboliques du temps de son enfance,nettement reconnaissables et situés.C'est de résurrection générale qu'il s'agit et de son lot d'humiliations,de frustrations ,de rictus grinçants,de récréminations d'un peuple déssaisi de sa liberté et de son histoire.L'acte de peindre se meut en affirmation d'identité.Le démiurge convoque la mémoire et génère un pays innocenté et requalifié,ses visions d'outre-tombe transposées dans l'avenir.



Autres mots de l'artiste à propos de son oeuvre:
"Je ne peins pas pour m'amuser mais par nécéssité.
Les étiquettes ne me gênent pas mais au départ il me semble que j'allais vers l'expressionnisme,le baroque ou quelque chose comme çà.
Moi je suis de la génération des lapsus.
Il faut bien mettre la haine quelque part".



Son œuvre,sa « saga » comme il le disait relève aussi de la fable.Elle s'est écrite au fil de ses empoignades avec la matière picturale,les éruptions telluriques irrépressibles,il aura théâtralisé une vie intérieure d'une grande richesse,fort d'un talent de coloriste indéniable et au prix d'une constance remarquable à l'endroit de son métier d'artiste.J'y lirais l'auto-analyse d'un hypersensible marqué,stigmatisé par des kirielles de traumastismes depuis l'enfance,des tabous religieux,moraux,sexuels,des aliénations écrasantes.Une thérapie donc,ses évolutions,ses seuils,ses rémissions,sa guérison et son pouvoir d'exorcisme collectif à quoi l'on reconnaît le génie ,je pense.« Eur mar'ch zod »: disait son père à son propos. « Le cheval fou a déversé sa charretée »devait-il dire plus tard pour faire comprendre par une image son engagement irrésistible en peinture.D'autres évoqueraient probablement le retour du refoulé ou les maléfices de Belzébuth.Qu'importe après tout puisque c'est l'Art qui y gagne et que s'avère une grande création.
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Une exposition imaginaire.


Rendre hommage à JeanTirilly consisterait ,par exemple,à réunir dans une grande fresque murale tous ses codex dans l'ordre chronologique,à l'image de ces danses macabres moyenâgeuses telles qu'on peut en voir à Plouha,Kernascléden ou Chatelaudren avec un accompagnement musical de préférence bretonne,la voix a cappella d'un JFKemener ou d'une A.Auffret tombant des voûtes.Mais je dois péché par excès de chauvinisme probablement.Et puis JeanTirilly a désormais une notoriété internationale et beaucoup de personnes compétentes s'occupent de son oeuvre.
Le déballage commercial d'Halloween aura supplanté la fête celtique de Samain,celle des retrouvailles annuelles des vivants et des morts.L'initiation à la mort n'est pas mauvaise en soi.Celle des gosses de notre génération se faisait autrement et...coûtait moins cher !...


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