mardi 15 juillet 2014
lundi 27 janvier 2014
Fanch Vidament peintre paysan.
Fanch
Vidament (1948-1982).
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(1clic sur photos pour agrandir).
Fanch Vidament
peintre paysan,précise-t-on
pour présenter
cet artiste
que la
Bretagne peut
se prévaloir
de compter
au titre
de ses
chantres,ses représentants
les plus
emblématiques et
les plus
émouvants.Le qualificatif
de douanier
est systématiquement
accolé à
celui d’Henri
Rousseau sans
que l’homme
en question
ait jamais
vraiment exercé
ce métier.La
légende quand
elle vous
colle au
dos ne
vous lâche
plus.Son installation
bien réelle
avec son
épouse et
deux autres
couples comme
gérant d’une
ferme à
Pont Kadik
près de
Callac(mon canton
d’origine)
s’inscrit,même
si sa
démarche,toute
personnelle, tient
du refus
obstiné de
contraintes pouvant
nuire à
son destin
d’artiste,dans
un vaste
mouvement post
soixantuitard d’inspiration
communautariste de
retour à
la société
naturelle.Je les
ai vus
ces jeunes
idéalistes,barbus et
chevelus,retour de
Katmandou peut-être,en
combi Wolswagen,du
shit pleins
les poches,
devant leurs
étals de
sabots de
bois,de bracelets
en cuir
,de colliers
ou leurs
fromages de
chèvres.Tel avait
stoppé net
ses études
de droit
ou de
politique tandis
que sa
compagne gardait
un demi-salaire
de fonctionnaire
pour assurer
la subsistance
du clan
car enfin
une autorité
s’avérait
nécessaire pour
garantir l’unité
et la
pérennité du
groupe.En son
absence chacun
partait de
son côté.La
plupart de
ces expériences
ne tiendront
pas longtemps.L’interdit
d’interdire
qui prévalait
alors a
ses limites.C’est
qu’il
faut être
de la
trempe des
paysans de
l’Argoat
pour perdurer
et faire
souche dans
ces contrées
au climat
rude,aux terres
pauvres,d’une
volonté et
d’une
moralité à
toute épreuve.
Fanch est
de ceux-là,entier,tout
de foi
et de
passion,dans son
travail quotidien,comme
dans son
art.Breton de
Paimpol,élevé parmi
les marins,mais
plutôt destiné
par des
parents conventionnels
aux études,il
se découvre
au lycée
technique de
Freyssinet à
StBrieuc des
aptitudes au
dessin et
comme mû
par une
révélation
irréfragable,décide,contre
l’avis
des siens,de
concilier et
le travail
de la
terre et
la peinture.Il
sera peintre
paysan.Le jeune
homme est
amoureux,fougueux,pressé,comme
par bravade
à l’endroit
de cette
maladie cardiaque
dont il
se sait
atteint et
qui l’emportera
dans la
force de
l’âge.Toute
son oeuvre
se décline
sous le
double signe
de l’urgence
et du
frémissement jubilatoire
et c’est
bien cela
qui lui
confère une
singularité et
lui forge
un style
personnel.
Paysages saisis au
gré des saisons.Récurrence des pentys,de quelques arbres stylisés,un chemin
montueux, quelques présences discrètes parfois.Tout est dans la nuance et la suggestion.
Un tableau de Fanch
parut dans le magazine Naous en 1982.La revue était dirigée et rédigée en
grande partie par Edmond Rébillé .(En noir et blanc).Gwen ha du en quelque
sorte.
« Désormais,le peintre paysan,retrace à travers ses grandes
toiles,la vie de tous les jours.Les gens qui l’entourent,les paysages qu’il
sillonne de long en large,les travailleurs de la terre,ou bien encore les
saisons sont sublimés avec une tendresse particulière » Olivier Levasseur.
« Bezan e man barz e vleud »
dit un adage breton pour signifier le bonheur de l’être dans son élément naturel.Fanch
est dans sa farine.Sa production témoigne de l’effervescence intérieure de
celui qui réalise au travers de ses
toiles successives la symbiose de la réalité et de l’âme des êtres et des lieux,
les vicissitudes de la vie paysanne.Rien ici qui ne pèse,gestes et instantanés
de la vie quotidienne sublimés par le talent,en osmose avec l’esprit enchanteur
de ces contrées du Kreiz Breiz dont rien ne semble avoir entamé la virginité
depuis la nuit des temps. « Le bocage subsiste,découpé par des talus
boisés qui délimitent landes romantiques,vertes pâtures peuplées de vaches
grasses,labours où les mouettes explorent chaque sillon nouveau.Ca et là le
soleil joue sur les toits de pentys souvent abandonnés.Un clocher effilé surgit
des feuillages.Partout règne un silence entrecoupé de chants d’oiseaux,de
stridences d’insectes,de frémissements d’herbes.Sérénité de la création du
monde.Joie pure ».Ce morceau de lyrisme est le fait d’un très grand
connaisseur de la Bretagne intérieure et particulièrement de la région de
Callac où il fut longtemps médecin :Edmond Rébillé.
Où va ce couple décidé?Aux travaux des champs ou à la pêche aux coques?.
La rage créatrice du peintre tient du coup de balai dans les toiles
d’araignées du pittoresque compassé des amateurs de scènes rurales,de
l’académisme celtisant des « notables » selon l’expression de Xavier
Grall à propos du fatalisme d’un Per Jakez Hélias.C’est l’époque de l’explosion
poétique,bardique,culturelle de la Bretagne : « Je les vois mes
compagnons.Je les entends dans la nuit.Je les vois dans la pauvreté de leur
condition et le luxe de leur parole…Et ce sont de grands soleils
délivrés ».In:"Le Cheval Couché".Les années 70,début des « trente glorieuses » dit-on
furent pour nous la fantastique libération d’un cri trop longtemps retenu,une
puissance de souffle à faire trembler les cimaises.Un cri et une parole qui n’a
pas encore vraiment trouvé dans cet incroyable hexagone sa traduction
politique.L’assentiment des peuples du monde nous est acquis.Les masques
tomberont comme des fruits blets. « Notre matin sera vierge au bout
de la route des malheurs et des avanies.Illuminés »..X.Grall.
Les retrouvailles du
bonheur simple du couple,des danses traditionnelles des Festou Noz retrouvées,des sabots de
bois requalifiés,les nouvelles générations comme autant de promesses.
Pourquoi ai-je pensé au célèbre tableau d'Eugène Delacroix à propos de cette
femme en violet ?.Presque deux siècles les séparent.Cette jeune femme du
peuple devenue l’icône de la révolution de 1830 est l’image même de
l’enthousiasme libérateur devenue
universelle : « la liberté guidant le peuple ».Une injonction
supérieure à passer coûte que coûte.Une force vitale d’égale
intensité,romantique pour
l’un,expressionniste pour l’autre,à moins que ce ne soit "essentialiste"pour reprendre la terminologie de son ami peintre Alain le Nost et l’utilisation du violet à contre
emploi,mais d’une rare efficacité.Une flamme dans la nuit.
Un homme et une œuvre des plus attachants.Quelques 300 huiles sur
toiles de grand format,malgré la brièveté de son existence,mais aussi des
dessins au fusain.Une trentaine d’expositions en Bretagne.Il meurt le 11
Novembre 1982 le jour de l’Armistice.Un signe peut-être quand on sait
l’hécatombe que la guerre de 14-18 aura été pour le peuple breton et
particulièrement le monde paysan.
Va zouar n’eo ked ar bed man.
O va zud ker va henvro koz
Sterennou breiz e zo luhan
Evel eun tann gwall e kreiz an noz.
Ma terre n'est pas de ce monde
O mon peuple et ma patrie bien aimés
Les étoiles de Bretagne brillent
Comme un incendie au milieu de la nuit.
(In:Les Chants Malicantour. 1985). J.T.
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Glanes autour de Fanch et de son oeuvre.
-Sa femme Marie-Thé.
"Il se jetait sur la toile,la maison en tremblait".
"Il échangeait un tableau contre une charretée de paille.Il était très généreux.
-Sa voisine Yvette.
''Un homme attachant et joueur,qui ne tenait pas en place.Il quittait son travail en plein champ ou la traite des chèvres pour répondre à un désir impérieux.Il peignait vite,d'un seul trait puis reprenait son travail. "Il nous faisait peur avec son tracteur sur ces terrains escarpés.Un vrai casse-cou"...
- Maëlle Looaëc.
"Ce fut pour moi une découverte,une révélation:miroir d'un monde si proche de moi,de mon de mon enfance dans cette Bretagne profonde et sauvage''...
- Anonymes.
" ll faudra aussi nous indiquer qui sont les Picasso,les Rembrandt,les Michel-Ange bretons"...
" Fanch Vidament est notre Nicolas de Staël breton" etc...
"Ce fut pour moi une découverte,une révélation:miroir d'un monde si proche de moi,de mon de mon enfance dans cette Bretagne profonde et sauvage''...
- Anonymes.
" ll faudra aussi nous indiquer qui sont les Picasso,les Rembrandt,les Michel-Ange bretons"...
" Fanch Vidament est notre Nicolas de Staël breton" etc...
mardi 7 janvier 2014
Qui a peur de Jean Tirilly?.
Certes,le peintre breton Jean Tirilly(1946-2009), natif de Léchiagat petit port breton de l'extrême pointe du Finistère n'a nul besoin d'une publicité supplémentaire pour une célébrité posthume.Célèbre et célébré il l'est depuis longtemps et sa gloire irait plutôt croissant.Qui veut découvrir ce peintre et artiste étonnant n'a que l'embarras du choix:Exposition permanente au musée spontané de Bruxelles,mais aussi le musée de Lausanne ou Pont Aven.Un livre intitulé"Jean Tirilly poète des couleurs",sous la signature de Maryvonne Gognalons Nicolet lui est également consacré.De nombreuses expositions lui ont permis de se faire connaître et de s'exprimer sur son art,car nous dit-on,ce grand timide savait se montrer bavard,à l'occasion.
(Un clic sur les photos pour agrandir).
Quelques toiles pour se familiariser avec l'art très spécial de Jean Tirilly.Il expliquait dans une interwiew:"En cinq minutes,le fond est fait.Quand je trouve ma couleur de fond,je sculpte,mais les personnages viennent comme cela...Tout ça c'est une transe.On n'est pas en train de réflléchir.C'est les yeux grands ouverts que je me dis:tiens si je mettais ça...Il y a le recul,toujours en marmonnant.Et la construction arrive.Les toiles s'enchaînent les unes après les autres."
Ses propos sont évidemment les plus importants de tous ceux qui gravitent autour de son oeuvre,souvent plus dithyrambiques que nécessairement pertinents."Comme les gosses un peu fous,mes tableaux me dépassent,explique-t-il.C'est un film en cours de montage,je m'arrête sur un plan séquence.Un plan à travailler d'urgence,sinon l'inspiration disparaît.On n'est pas dans le normal mais dans l'acte de peindre".Et de codex en codex un monde se révèle qui bouleverse ,irrite,séduit ou révulse,mais en tous cas ne laisse jamais indifférent.Car ici chacun comprend que par-delà l'étrangeté,la monstruosité,au-delà du premier impact il est question d'âme et d'amour,cet art étonnant nous oblige et nous conduit à nous-mêmes.
(Un clic sur les photos pour agrandir).
Taleouennou(crânes). |
Quelques toiles pour se familiariser avec l'art très spécial de Jean Tirilly.Il expliquait dans une interwiew:"En cinq minutes,le fond est fait.Quand je trouve ma couleur de fond,je sculpte,mais les personnages viennent comme cela...Tout ça c'est une transe.On n'est pas en train de réflléchir.C'est les yeux grands ouverts que je me dis:tiens si je mettais ça...Il y a le recul,toujours en marmonnant.Et la construction arrive.Les toiles s'enchaînent les unes après les autres."
Ses propos sont évidemment les plus importants de tous ceux qui gravitent autour de son oeuvre,souvent plus dithyrambiques que nécessairement pertinents."Comme les gosses un peu fous,mes tableaux me dépassent,explique-t-il.C'est un film en cours de montage,je m'arrête sur un plan séquence.Un plan à travailler d'urgence,sinon l'inspiration disparaît.On n'est pas dans le normal mais dans l'acte de peindre".Et de codex en codex un monde se révèle qui bouleverse ,irrite,séduit ou révulse,mais en tous cas ne laisse jamais indifférent.Car ici chacun comprend que par-delà l'étrangeté,la monstruosité,au-delà du premier impact il est question d'âme et d'amour,cet art étonnant nous oblige et nous conduit à nous-mêmes.
Quelques propos sur Jean Tirilly.
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"Comment décrire ces
mêlées humaines,ce grouillement de vie,ce match frénétique et
bariolé...Avec ces visages,masques aux orbites creuses,la bouche
toujours ouverte comme citrouilles crevées,ces vieilles serrures
détraquées,le jeu savant des entrelacs colorés,stylisations de
bras et de jambes sans corps et les échappées vers le ciel ou la
mer ou des morceaux de décors champêtres,bouts de paysages,villages
traités au minimum,comme dans les fonds des primitifs Italiens.Un
monde d'agonisants joyeux,de morts-vivants en effervescence de
zombies en goguette plus proche de la « ballade des pendus »
ou d'une vision festive du Jugement dernier que de la frivolité
profane de la « comédia del arte »..La
couleur,très savamment maîtrisée est trompeuse dans l'univers de
Tirilly,où rôde la faucheuse,l'Ankou des enclos paroissiaux,avec un
coloriage de bande dessinée...Théâtre de pantins où se joue la
vie et la mort dans un stade en furie...
Un art très
mental,condensé de vie,où dans une écriture symbolique d'une
grande cohérence,ce Villon de la peinture,grand poète d'une époque
de mutation nous offre avec un minimum d'accessoires de belles fables
non-verbales sur les pérépéties actuelles de la condition
humaine"...
Laurent Danchin.
Visiter une exposition de Jean Tirilly ou simplement faire connaissance avec quelques unes de ses productions n'est jamais un acte anodin.L'artiste à la façon de l'araignée vous attire dans sa toile et ne vous lâche plus.On n'en sort pas indemne.Ce signe à lui seul prouve l'authenticité et l'importance de sa création et de son engagement d'homme dans l'art qu'il s'est choisi à moins que ce ne soit l'inverse.
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Grand,Jean Tirilly l'est
quand,mû par la nécessité intérieure,il fait ressurgir des limbes
l'âme et l'esprit d'un peuple,le sien, le mien,le peuple breton par
le truchement de quelques détails symboliques du temps de son
enfance,nettement reconnaissables et situés.C'est de résurrection
générale qu'il s'agit et de son lot d'humiliations,de frustrations
,de rictus grinçants,de récréminations d'un peuple déssaisi de sa
liberté et de son histoire.L'acte de peindre se meut en affirmation
d'identité.Le démiurge convoque la mémoire et génère un pays
innocenté et requalifié,ses visions d'outre-tombe transposées dans
l'avenir.
Autres mots de l'artiste à propos de son oeuvre:
"Je ne peins pas pour
m'amuser mais par nécéssité.
Les étiquettes ne me
gênent pas mais au départ il me semble que j'allais vers
l'expressionnisme,le baroque ou quelque chose comme çà.
Moi je suis de la
génération des lapsus.
Il faut bien mettre la
haine quelque part".
Son œuvre,sa « saga »
comme il le disait relève aussi de la fable.Elle s'est écrite au
fil de ses empoignades avec la matière picturale,les éruptions
telluriques irrépressibles,il aura théâtralisé une vie
intérieure d'une grande richesse,fort d'un talent de coloriste
indéniable et au prix d'une constance remarquable à l'endroit de
son métier d'artiste.J'y lirais l'auto-analyse d'un hypersensible
marqué,stigmatisé par des kirielles de traumastismes depuis
l'enfance,des tabous religieux,moraux,sexuels,des aliénations
écrasantes.Une thérapie donc,ses évolutions,ses seuils,ses
rémissions,sa guérison et son pouvoir d'exorcisme collectif à quoi
l'on reconnaît le génie ,je pense.« Eur mar'ch zod »:
disait son père à son propos. « Le cheval fou a
déversé sa charretée »devait-il dire plus tard pour faire
comprendre par une image son engagement irrésistible en peinture.D'autres
évoqueraient probablement le retour du refoulé ou les maléfices de
Belzébuth.Qu'importe après tout puisque c'est l'Art qui y gagne et
que s'avère une grande création.
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Une exposition
imaginaire.
Rendre hommage à
JeanTirilly consisterait ,par exemple,à réunir dans une grande
fresque murale tous ses codex dans l'ordre chronologique,à l'image
de ces danses macabres moyenâgeuses telles qu'on peut en voir à
Plouha,Kernascléden ou Chatelaudren avec un accompagnement musical
de préférence bretonne,la voix a cappella d'un JFKemener ou d'une
A.Auffret tombant des voûtes.Mais je dois péché par excès de chauvinisme probablement.Et puis JeanTirilly a désormais une notoriété
internationale et beaucoup de personnes compétentes s'occupent de son oeuvre.
Le déballage commercial d'Halloween aura supplanté la
fête celtique de Samain,celle des retrouvailles annuelles des vivants et des morts.L'initiation à
la mort n'est pas mauvaise en soi.Celle des gosses de notre
génération se faisait autrement et...coûtait moins cher !...
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