En quelques questions.Vrai et faux.Et images.
Le voilà,j'en suis sûr maintenant.Il est encore loin dans les ténèbres mais je distingue de plus en plus nettement une grande silhouette,un large chapeau surmonté d'une plume de paon,la collerette blanche des mignons d'Henri III,la culotte bouffante,des bas soyeux que l'on dirait de femmes,les escarpins légers,une fine moustache et un collier de barbe duveteuse,le pourpoint ample et un longue épée au côté gauche,règlementairement,militairement.L'homme est jeune et d'une politesse exquise.Mais c'est qu'il s'adresse à moi dans ma langue maternelle:''Salud dachui autrou yann!''.Comment est-ce possible?,et pourtant je suis dans la certitude que c'est lui,de ce savoir irréfutable des rêves profonds.Lui,Ar Bleiz,le loup,an droug hag ar maro,le mal et la mort,lui le massacreur de Bretons,le sabreur impitoyable,le criminel impénitent.Etrange sensation!.Il m'inspire davantage de pitié que de haine..Et soudain ce cri épouvantable,désespéré surgissant de milliers de poitrines du tréfonds des forêts et des profondeurs de la mer: "La Fontenelle!" "La Fontenelle!" et la cavalcade endiablée des guerriers de l'apocalypse.Je me réveille en sursaut,tout en sueurs...froides!.
La Fontenelle est un personnage inventé. faux.
Il nous est connu essentiellement par les mémoires du chanoine Jean Moreau,son contemporain et compatriote breton ,ligueur comme lui,témoin capital et fiable,mais aussi par la gwerz qu'il inspira et qui acquit une célébrité à la parution du Barzaz Breiz du marquis de Lavillemarqué d'une part ,puis à celle des Gwerziou breiz Izel de François Marie Luzel en 1868.J'ai fait pour ma part la connaissance des deux versions de la réédition de 1971par GP.Maisonneuve et Larose.La version chantée par Anne Salic de Plouaret en 1864,me paraissant la plus authentique.Les autres documents valablement "historiques"sont rares et demandent à être examinés à la loupe.Le personnage pour sa part aura inspiré une quantité de livres de toutes sortes(récits,romans,études en tous genres..)et continue à le faire.La postérité n'en est pas encore venu à bout.lls tiennent parfois du roman historique,voire de l'histoire romancée tel ''Le loup'' ou ''Brigand de Cornouaille'' de louis Moreau,qui existe désormais sous une forme audio,ou''la Fontenelle le ligueur''de Me..Baudry,l'un des plus anciens et des plus complets.D'autres étudient plutôt l'époque de la Ligue en Bretagne en historiens rationnels et modernes,tel Hervé le Goff,d'autres aussi tel Yann Brekilien d'un point de vue nationaliste ,ce qui peut aussi s'expliquer.Stendhal,Maxime du Camp,le Breton Emile Souvestre ont aussi donné leur vision et version du personnage.Plus près de nous,l'historien Alain Croix lui consacre un chapître dans son étude sur l'''Age d'or de la Bretagne''.
Le sujet est porteur,''le sang fait vendre''.L'engouement de nos contemporains pour cet ancien brigand et ses pareils relève aussi de cet adage,comme les émissions criminelles fascinent des générations successives de téléspectateurs de tous âges.Ainsi va l'homme,son vieux cerveau ,sa barbarie contenue à fleur de peau.
A quelle époque se situe cette histoire?.
Né vers 1972,soit l'année de la StBarthélémy,ses faits et gestes principaux se situeront entre 1590 et 1598 soit à la signature de l'Edit de Nantes durant cette période dite 8ème guerre de religion,marquée en France par les sanglantes batailles de Coutras,de Vimory,d'Auneau,d'Arques ,d'Ivry,la journée des barricades,les sièges de Paris etc..C'est la période dite de la guerre des trois Henri.La Ligue catholique,la Saint Ligue,ou la sainte Union est le nom donné à un parti de Catholiques qui s'est donné pour mission la défense de la religion catholique contre le protestantisme.De succès en succès elle devient bientôt un danger pour la monarchie.Le programme des ligueurs outre la défense de l'Eglise,comprend la défense de la royauté et des Etats généraux.On verra pourtant en 1588 le roi Henri III mis dans dans l'obligation de fuir Paris.Henri de Guise chef de la Ligue et fait lieutenant général du royaume ou chef des armées mais surtout sur le point de prendre le pouvoir est traîtreusement assassiné sur ordre du roi Henri III à Blois.C'est le soulèvement général.Toutes les provinces tenues par la Ligue se soulèvent contre Henri III qui est assassiné à son tour le 1er Août 1589.La Ligue dès lors opposera une résistance acharnée au prétendant légitime au trône de France à savoir le Huguenot Henri de Navarre,avec le concours de l'Espagne catholique.Elle ne désarmera totalement qu'au moment où Henri IV abjure la foi protestante.La fin définitive de la Ligue ayant lieu après la soumission du Duc de Mercoeur ,gouverneur de Bretagne et cousin d'Henri III.
La Ligue en Bretagne.
La Bretagne,dans son splendide isolement,mais officiellemnt unie à la France depuis la promulgation des édits de François Ier en 1532 ,vit un âge d'or.Son autonomie reconnue par le pouvoir central,c'est à dire ses privilèges fiscaux et règlementaires acceptés lui permettent de bénéficier d'une paix relative favorable à son développement économique,son agriculture diversifiée,ses industries florissantes dans le textile,d'un commerce de dimension européenne par ses nombreux ports et sa flotille La prospérité dont elle jouit durant le XVIème siècle,début 17ème se lit aujourd'hui encore dans les nombreuses et opulentes églises construites à cette époque,les célèbres enclos paroissiaux (StThégonnec,Ploumilliau etc..) ou des villes comme Locronan par exemple.Cet essor exceptionnel sera bientôt compromis par les troubles de la Ligue entre 1590 et 1598.Elle se voit alors rattrapée par la question religieuse et ses méfaits sans apparente raison car le protestantisme en cette région catholique est quasi inexistant.
Le professeur et historien Georges Minois explique:''Profitant des démêlées des Guise,ses cousins avec HenriIII,le duc de Mercoeur,époux de la duchesse de Penthièvre et gouverneur de Bretagne depuis 1582,va tenter ,en soutenant le parti ultra catholique de mener une politique personnelle dont les buts ne sont pas encore éclaircis et ne l'étaient sans doute pas même dans l'esprit du duc...Le Penthièvre sera la principale victime de la guerre de coups de mains qui s'ouvre en 1589 entre ligueurs et royalistes.La ligue fut plutôt pour les paysans l'occasion de piller villes et châteaux,pour les bourgeois d'obtenir une plus grande autonomie municipale,pour les nobles de régler leurs comptes avec les familles rivales,pour les brigands de ravager les campagnes en toute impunité...Un récit des évènements est impossible,nous assistons plutôt à une poussière de coups de mains,de razzias,d'escarmouches, de pillages dans lesquels royalisme et religion ne sont que prétextes''.
StBrieuc,royaliste au début du conflit,fut prise en 1589 par la Ligue,en 1591 par les royalistes,les ligueurs à nouveau en 1592, en même temps que la tour de Cesson.
Autre exemple:Lannion aura donc été pillée quatre fois pendant la Ligue:En 1590 par les troupes de Mercoeur,en 1593 et en 1596 par les brigands de la Fontenelle,enfin en 1598 par les troupes du roi sous le commandement des capitaines Thomy la Broustière et la Guette-Cambriga.
En dehors de La
Fontenelle qui me sert ici de fil rouge pour mon étude,la mémoire collective et
les annales ont retenu les noms d’une poignée de grands bandits,parfois nobles
en rupture de ban,coupables de pillages et de tueries de paysans au besoin,mais
aussi de roturiers voleurs,détrousseurs en tous genres,au besoin criminels,gens
de sac et de corde à la vie généralemnt brève.Cette période troublée où
l’exemple du jugement expéditif par le fer et le sang vient d’en haut est
particulièrement fournie en exactions et forfaits divers.
L’espérance de
vie déjà guettée par les épidémies bien connues et les blessures bénignes qui
dégénèrent vite,est courte.La religion,dès lors,apparaît comme l’ultime
recours,en l’absence d’une médecine efficace contre les infections et autres
gangrènes.C’est dire l’importance de son pouvoir sur les esprits en ces temps
de crédulité et d’ignorance.Les routes quand elles existent sont peu sûres et
tout voyage hors de sa sphère habituelle est aventure scabreuse.Quand il
fallait 3 ou 4 jours pour aller de Rennes à Brest,mieux valait éviter les
pauses nocturnes dans les bois,être accompagné et aussi armé que possible.
L’histoire
des ‘’collecteurs de la lieue de grèves’’occupe une place particulière dans la
mémoire des Trégorois..On appelait ainsi une bande de brigands qui depuis le
Moyen-age et jusqu’au 19ème siècle guetta les voyageurs le long de
cette grève nue entre StMichel en grève et StEfflam.’’Tout homme attaqué,pris
entre la mer et les fourrés impénétrables,avait tôt fait d’être dévalisé puis
de disparître dans les sables à la marée montante....De temps en temps quand
les plaintes s’élevaient trop fort,intervenait la maréchaussée,voire quelques
seigneurs du voisinage’’In Info Bretagne.com.La tradition populaire,à travers
les trois gwerziou qui lui sont consacrés,a gardé le souvenir de Marc’harit
Charlès et ses complices,les frères Rannou de Loquirec,deux coquins
magistralement charpentés qui assommaient les gens à coups de penn-baz.On disait
‘’forts comme Rannou’’.Femme chef de bande redoutable durant la
Ligue,préfiguration de Marion du Faouët,qui rançonnait tuait à l’occasion les
voyageurs se rendant de Lannion à Morlaix et inversement.’’On la disait belle
fille et faisait boire à qui voulait s’engager dans sa troupe,en guise
d’épreuve préliminaire, une pinte de sang humain’’
L’histoire veut
que les protagonistes de ces sombres méfaits aient fini sur la potence.’’En
1598,on envoya comme il est dit dans la ballade,une petite troupe de
soldats,Espagnols je crois,pour purger le bois
de Coatendrezen en la commune de Tréduder ,repaire des bandes de voleurs sous le commandement de Marguerite Charlès et des frères
Rannou’’écrit François Marie Luzel,commentant la gwerz consacrée à la brigande.
Je
constate,plus j’avance dans la connaissance de ces grands brigands qu’ils ont
en commun d’être de joyeux fêtards,volontiers conviviaux et partageurs quand le
butin est abondant.Les pardons et les marchés étaient l’occasion d’aborder et
d’agresser les marchands et voyageurs cossus,profiteurs en tous genres à leurs
yeux qu’ils rançonnaient de gaieté de cœur.Un autre grand bandit généreux se
fera connaître en France un siècle et demi plus tard pour sa générosité
sociale :le célèbre Mandrin,dans la région de Savoie.On parle même à
propos de la Charlézen d’un véritable racket à grande échelle de type mafieux
avec la complicité de la maréchaussée.Un autre point commun est la trahison des
proches et le piège dans lequel il finissent par tomber,victimes de leurs
penchants naturels ou de leurs faiblesses sentimentales.La gwerz(complainte)
recueillie à Ploumilliau par l’abbé M.F.Daniel rapporte comment la brigande se
fera circonvenir par son voisin le seigneur de Kéranglas qui,l’invitant à
devenir la marraine de son dernier enfant la fera prisonnière.Mais il est dit
bien autre chose dans cette gwerz longue de 200 octosyllabes.Ci-après les
confessions de la pécheresse,peu avant sa pendaison.La chanteuse Marie Clec’h qui
rapporte cette gwerz lui fait dire précédemment :
‘’Wit on da vea
lac’herez
Deuz va gorf
non ket pecherez’’.
Bien que je
sois meurtrière
De mon corps je
ne suis pas pécheresse.
Elle ajoute
,comme souvent dans les derniers repentirs des malfaiteurs avant de paraître
devant ce Dieu auquel ils croient tous :
‘’Poent
a-walc’h é ma distruja’’
Il est temps
d’en finir avec moi.
‘’Quoiqu’il en soit et quand la Charlès et les
Rannou eurent été branchés(pendus),la paix ne régna pas pour autant sur la
Lieue de grève.Les fourrés et les landes continuèrent de servir de repaire aux
voleurs de grand chemin...La légende fait encore mention d’une Marie
Charlès,fille de Mac’harit qui lui succéda à la tête de la bande’’.
Autres repaires
et lieux de guet-apens.
L’étude de la
toponymie bretonne sur la commune de Duault nous apprend l’existence d’un lieu
nommé’’Toul a lerien’’non loin des gorges du Corong.’’Le trou des voleurs’’fut
un repaire d’hommes traqués durant les siècles et notamment celui des deux
célèbres bandits Gaudu et Le Saux.’’Près d’une des cavernes où ils se
cachaient,nous dit Edmond Rébillé,se voit une table de pierre où ils devaient
dépecer les bêtes chapardées...L’amoncellement de rochers est couronné d’un
rocher bizarre que l’érosion a sculpté sur sa face Nord’’.
De siècles en siècles,l’exploitation des
paysans par les seigneurs locaux ou exercée au nom de quelque roi, générant la
précarité et la misère,des bandes de malfaiteurs poussés par la faim se
succéderont en ces lieux comme en d’autres. Les sables mouvants de la Lieue de
grève où tant de vies innocentes ont vu leur fin restent à jamais muets.On
pourrait les croire victimes de la marée montante,dangereuse à cet endroit à
l’égal de celle du Mont StMichel. N’étaient les témoignages indirects,volontiers
naïfs mais d’une sincérité absolue des chanteurs et chanteuses de
gwerziou,porteurs de la mémoire collective du peuple breton,nous ne saurions
d’ailleurs rien de ces méfaits lointains.Nous devons à leur extraordinaire
mémoire un véritable fonds culturel d’une très grande richesse.A côté de
conteurs et surtout conteuses anonymes,de bardes souvent infirmes ou aveugles
et donc devenus inaptes aux travaux des champs comme Garandel de
Plouaret,Mathilin an Dall le musicien,Anne Salic,Jeanne le Gall,Maria Prat
etc..brille une véritable star :Marc’harit Phulup ou Marguerite
Philippe,en Français, dite la ‘’Cigale des brumes’’.’’Elle avait retenu 259
gwerziou,sonniou et grac’hed koz ou contes de fées et les récitait avec une
assurance parfaite sans faire de confusion,ni
se trouver en défaut,soit pour l’air ,soit pour les paroles’’nous dit Guy
Castel dans l’ouvrage qu’il lui a consacré.Elle fut et de loin,la principale
mémoire bretonne.Les autres relais jusqu ‘à nous sont bien sûr les
collecteurs désormais célèbres que furent La Villemarqué,F.M. Luzel ou Anatole
le Braz,par exemple,et les récents enregistrements et travaux de musicologie
réaliser par l’association Dastum.L’essentiel apparaît sauvegardé.L’un des
premiers enregistrements au magnétophone réalisé permet d’entendre aujourd’hui
la voix de Marguerite Philippe.Il fut le
fait de Charles le Goffic.
Photos noir et
blanc :emprunts à ‘’La cigale des brumes’’.Guy Castel.Skol.1967.
La
pauvresse,infirme de la main gauche,ne connaissait pas un mot de Français,et
c’est peut-être bien la raison pour laquelle elle aura pu restituer son trésor
à la postérité.Son extraordinaire mémoire sera restée intacte de tout
parasitage.Il lui sera arrivé seulement parfois de déborder de son sujet et
d’inventer pour son compte.Ainsi de cette gwerz étrange dite ‘’la belle Catoise’’que personne,même
Luzel, ne comprend pas vraiment où apparaît un La Fontenelle tout à fait
incongru :
‘’La Feuntenell
me ‘wuié mad
A anvejan euz da lagad’’.
La Fontenelle je savais bien
Que je te reconnaîtrais à ton œil.
Tout se passe
comme si ,ayant entendu la gwerz de Fontanella,elle voulait caser ce nom
quelque part pour sa seule musicalité,ou par simple fantaisie.Le brigand
déchargé de ses crimes,de son humanité même devient prétexte à comptine ou
chanson à l’instar d’un Mandrin ou de Compère Guilleri,ou marionnette dans
d’autres cas.L’inconscient collectif se venge serais-je tenté de dire.Le peuple
conjure ses peurs,exorcise ses démons par ses moyens habituels :le récit,le conte ,la
transposition dans l’imaginaire,la mise en scène,la danse parfois et la
musique.
Toute gwerz est
un récit complet toujours faite de paroles prononcées par les personnages avec
beaucoup de solennité et faite pour émouvoir aux larmes un auditoire attentif
et complaisant.Le roman à l’eau de rose avant l’heure,la part du rêve et du
fantasme indispensable à chacun pour se sortir d’un quotidien banal et souvent
sordide.Le brigand y passe volontiers pour courageux et chevaleresque.Ainsi,parallèlement
au récit ‘’historique’’ et au témoignage in situ et de visu sur l’’’homme’’,du
chanoine Jean Moreau devenu mémorialiste,le personnage de La Fontenelle
apparaît dans la gwerz,non pas pour ses crimes mais comme un amoureux éperdu
qui enlève une jeune fille pour en faire son épouse,une histoire d’amour
passionnelle en quelque sorte,prétexte à chanter et à émouvoir,poussée à
l’extrême puisque la jeune fiancée mourra de chagrin en apprenant la vérité sur
son amant fougueux.Al Capone non plus ne sera pas arrêté pour ses crimes,mais
bel et bien pour une péccadille de fraude fiscale !.
Que faisait
la police ?.
Il va de soi
que les agissements crapuleux de la Charlézen et sa bande relèvent du droit
commun.La justice,même en ces temps reculés,s’exerçait dans les juridictions seigneuriales
et si elle ne punissait pas sans preuves,elle n’y allait pas de main morte.L’usage
des fusils et pistolets se développe au
16ème siècle,entraînant une législation nouvelle.Les voleurs
souvent récidivistes et marqués d’un V
infâmant sur l’épaule,les membres reconnus des bandes criminelles avaient tôt
fait de faire connaissance avec la corde.Une autre gwerz chantée par Anne Marie
Tilly de la paroisse de Berhet et recueillie par F.M.Luzel en 1868 conte les
mésaventures du contrebandier en tabac et alcool Fanch ar C’halvez,amoureux de
sa belle Anne Jacob mais arrêté par les archers et promis à la peine de
mort.Cette gwerz très émouvante est reprise aujourd’hui et excellement
interprétée par le groupe Strobinell.(En partie car au total la gwerz fait 94
vers)..
Les brigandages et autres comportement
déviants inspirés par la Ligue et
souvent au nom de la religion,marquent la fin des temps médiévaux et la toute
puissance des seigneurs locaux.Ses excès conduiront à une justice de plus en plus étatique.La centralisation autoritaire du pouvoir royal poussée à
l’extrême entraînera d’autres révoltes de type jacqueries dans les siècles
suivants dont celle des bonnets rouges bien entendu..Pour l’heure beaucoup de Bretons ont
le réflexe indépendantiste et les petits hobereaux vivent mal la perte de leurs privilèges du temps du dûché souverain.Ils viendront grossir les rangs des bandes organisées des capitaines
brigands qui vont pourrir la vie des Bretons en général à la fin du 16ème
siècle.
En quoi La Fontenelle est-il Breton?
Le Guy Eder qui naît en 1572 ou73,soit au château du Leslay près de Quintin,soit au manoir de Longle en Guenrouët dans la région Nantaise,est d'ascendance bretonne du côté paternel et maternel puisque né de Pierre Eder de Beaumanoir de la Haye et de Péronnelle de Rosmar de Kerdaniel.Son frère aîné Amaury cumulera tous les titres de la famille Eder après la mort de leur père,voir ci-dessous.Tous ces biens seront ensuite dispersés.Guy ne portera que le nom de La Fontenelle en tant que juveigneur c'est à dire propriétaire d'un bien revenant en droit à un cadet de famille quelque soit son rang,selon la coutume de Bretagne.
La famille Eder gravite depuis des générations dans l'entourage immédiat des ducs de Bretagne à des postes et offices très importants.On peut considérer cette famille de par ses seigneuries et propriétés diverses comme richissime pour l'époque et très influente politiquement.
On voit sur ce premier tableau le grand-père paternel Robert Eder de Beaumanoir affublé du titre de capitaine des gentilhommes de l'évêché de St Brieuc.Propiétaire du château de la Fontenelle en Trégueux,il résidait surtout rue StJacques à StBrieuc près de la cathédrale forteresse,pour les besoins du service probablement.Oligarchie et népotisme ne datent pas d'aujourd'hui!
Il y a donc bien filiation à la famille Beaumanoir par les femmes.
La
cathédrale forteresse de StBrieuc conserve quelques souvenirs
de l’époque de Christophe de Penmarc’h et son frère
Louis,frères du grand-père maternel de Guy Eder.Christophe de Penmarc'h passe pour avoir été un bon évêque protecteur durant la période très pénible de la guerre de succession de Bretagne.Ses liens familiaux
avec ce membre éminent de la hiérarchie Catholique peut expliquer
en partie son adhésion aux thèses de la Sainte Ligue.Il se
souviendra certainement des ses appartenances familiales quand il se
livrera plus tard à la boucherie de Penmarc’h et au sac de
Pont-Croix en Cornouailles.Un prétexte comme un autre,à défaut de
véritables motifs ou casus belli de la part des populationsJe frémis à la vision de ce garçonnet qui
entre dans la cathédrale,tenant la main de son grand-père.C’était
il y a 500 ans.Il me semble que pas grand-chose n’a changé dans ce
vieux quartier de StBrieuc,les halles exceptées,de la cathédrale
massive,des maisons à colombages des rues Fardel ou Quinquaine.Le
temps file,les acteurs passent,la scène demeure,parfois
désespérement vide,parfois peuplée et frémissante des cris et
gesticulations d’une population étrange et étrangère et pourtant la nôtre:nos aëux pour le meilleur et pour le pire.
On dénie parfois au
brigand son appartenance à la maison De Beaumanoir.''Ce folâtre Guyon n'avait
d'autre rapport avec la maison De Beaumanoir,célèbre par le combat
des Trente que d'être né dans un château de ce nom qui appartenait
à sa famille'' écrit même le chanoine Jean Moreau.Cette assertion
est fausse.Les états de la généalogie bretonne aujourd'hui font
nettement apparaître une aïeule à la 5ème génération du nom de
Jeanne de Beaumanoir mariée à Amaury Eder et qui apporte à cette
famille une dot considérable comprenant la seigneurie de Beaumanoir
en Leslay mais aussi Caden en Sarzeau et Branzun en Surzur,ces deux
domaines dévolus à la garde du château de Suscinio,résidence
secondaire des ducs de Bretagne.Des mystères,des blancs parfois
apparaissent dans les généalogies.Si le château du Leslay fut
construit à l’initiative d’Odile de Beaumanoir,épouse du
seigneur de Quintin,fille de Jean de Beaumanoir,héros du combat des
trente,qui donc est cette Jeanne pour en hériter ?Elle est à
coup sûr une aîeule du brigand mais son lien avec la
prestigieuse famille des Beaumanoir d’Evran m’échappe en
l’absence d’une trace de son ascendance dans les archives.C’est
elle qui prend le nom de son domaine et le transmet par mariage,semble-t-il..La
lutte pour les titres et les apanages était rude et les
considérations morales n’étouffaient personne.En remontant dans
la généalogie de la famille Eder qui habitait le château du Leslay
depuis le 15ème
siècle on rencontre des évènements violents.Ainsi de Jehan Eder
de Beaumanoir épousant Marie de Villiers,veuve du seigneur de la
Hunaudaye.’’Ce mariage déplut aux Tournemine :ils firent
assassiner leur beau-père par quelques uns de leurs gens et il fut
enterrré dans l’église de l’abbaye de Saint Aubin des Bois’’.in
Info.Bretagne .com.En 1422,le duc Jean V donne à Pierre Eder,son
chambellan et maître d’hôtel,la terre de Plouagat qui venait
d’être confisquée sur les Penthièvre.(sic).Elle sera revendue
plus tard au fils de François II par Gilles le petit-fils de Pierre
Eder.Il faut croire que le futur brigand avait de qui tenir.
‘’Folâtre Guyon’’,ainsi que
le nomme le chanoine Moreau,qui est le seul témoin à l’avoir
connu et fréquenté physiquement au collège Boncourt à Paris est
le cadet d’une illustre et richissime famille très influente
politiquement à l’époque.C’est dans cette famille ,à mon sens
,qu’il faut chercher les raisons de son adhésion à la Ligue et
une réponse aux questions que l’on peut se poser sur son
comportement futur.
Au nombre des raisons qui m’ont amené à
vouloir étudier le cas la Fontenelle et l’époque de la ligue en
Bretagne,il y a cette découverte stupéfiante que j’ai faite
récemment :cet incroyable criminel dont je n’avais qu’une
vague connaissance mais que j’abominais bien entendu comme tout le
monde,aura fréquenté bien avant moi bon nombre de mes lieux
habituels,ce cadre dans lequel je vis quotidiennement.Depuis il me
poursuit tel un fantôme et si je le traque un peu partout sur mon
territoire,j’ai le sentiment parfois que c’est moi le
traqué et que je me dois à cette histoire d’une manière ou d’une
autre.Il y va de l’idée que je me fais de mon rapport à
l’Histoire.La seule relation des faits et gestes d’un héros noir
déjà mis en scène bien des fois par des romanciers talentueux ne
serait que redondance médiocre.Un film tant qu’à
faire !.mérite-il tant d’honneur ?.Ma réponse est
non,même pour une apologie du mal.Il vaut bien davantage par ce qu’il n’a pas
su être,ni porter l’espérance qu’il avait fait naître dans
l’esprit de beaucoup de ses compatriotes que par ce qu’il a
été.Une occasion manquée,une de plus,de relations plus
compréhensives de la part de ce puissant voisin
français,ombrageux,autoritaire,souvent apeuré et prompt à punir
toute revendication de liberté bretonne nécessairement associée à
quelque volonté irrédentiste.Mais nous n’y sommes pas encore.
Etudes à Paris .
L'enfant grandit
entre Penthièvre et Trégor,Eder et Rosmar Kerdaniel mais aussi ses
nombreux cousins tels jean de la Noé de Plélo qui lui restera fidèle
compagnon ou G de Rosmar qui l'accompagnera durant ses années d'études à Paris
Adhésion à la Ligue.
Les méfaits.Carte et récit.(à venir...)